Hytale dévoile son processus de création de modèles 3D

L’équipe de développement d’Hytale a publié un guide détaillé sur la création de modèles dans l’univers du jeu. Thomas Frick, directeur artistique du projet depuis dix ans, partage les fondements du style visuel qui définit cette production attendue depuis plusieurs années. Ce document s’adresse autant aux créateurs expérimentés qu’aux curieux souhaitant comprendre les choix techniques derrière le rendu particulier d’Hytale.
Le guide aborde les contraintes géométriques, les résolutions de textures et les outils mis à disposition de la communauté. Il révèle également comment l’équipe maintient une cohérence visuelle à travers différents modes de jeu et univers, du monde médiéval-fantastique d’Orbis aux mini-jeux futuristes. Une approche qui repose sur des principes stricts mais suffisamment flexibles pour encourager la créativité des joueurs.
Ce partage intervient alors que le jeu reste en développement et s’inscrit dans une volonté affichée de préparer la communauté aux outils de modding qui seront disponibles lors du lancement.
Sommaire
Un style visuel hybride entre pixel art et 3D moderne

Hytale se positionne comme un « jeu voxel stylisé moderne avec des textures pixel-art rétro ». Cette définition résume l’équilibre recherché entre les capacités des moteurs actuels et l’esthétique des jeux en pixel art classiques. Le rendu final croise deux univers visuels généralement opposés : la basse définition du pixel art et la peinture 3D à la main.
L’équipe a établi quatre piliers artistiques qui guident chaque création. Le premier vise l’immersion à travers un monde réactif où le vent anime les feuilles, les créatures expriment des émotions par leur regard et l’environnement répond aux actions du joueur. Le pilier fantastique assure que le style reste reconnaissable même en dehors du monde principal, que ce soit dans des univers préhistoriques ou des arènes spatiales.

Le caractère stylisé se traduit par des proportions particulières, une palette de couleurs contrôlée et des choix qui privilégient la lisibilité. Les modèles doivent être identifiables instantanément, même dans des environnements chargés. Enfin, la flexibilité découle de l’utilisation de formes primitives simples (cubes et quads) qui facilitent la compréhension et la modification des créations.
Des contraintes techniques au service de la performance
Le moteur graphique d’Hytale ne suit pas les standards habituels de l’industrie. Il n’utilise pas les workflows PBR (Physically Based Rendering) avec leurs cartes de rugosité, normales ou de déplacement. Cette décision volontaire sert deux objectifs : préserver le style artisanal des textures et garantir des performances correctes sur des configurations modestes.
Le jeu doit afficher simultanément plusieurs milliers de blocs et voxels, ce qui représente plusieurs millions de triangles par image. Les artistes doivent donc optimiser drastiquement leurs modèles pour limiter l’impact sur les cartes graphiques. Cette contrainte explique la simplicité géométrique imposée : uniquement des cubes (6 faces) et des quads (2 faces). Pas de boucles d’arêtes, pas de topologie complexe, pas de triangles ou pyramides.
Les ombres et lumières sont peintes directement dans les textures, puis complétées par l’éclairage dynamique du moteur. Le rendu final combine shadowmaps, SSAO (ambient occlusion), brouillard et bloom pour créer une atmosphère chaleureuse. L’équipe travaille actuellement sur des améliorations : correction des problèmes de propagation lumineuse, contrôle colorimétrique avancé, rais de lumière et transparence du verre.
Le plugin Blockbench et les règles de modélisation

Hytale fournit un plugin dédié pour Blockbench, le logiciel de modélisation voxel gratuit. Cet outil maintient un ratio de pixels cohérent sur les textures et exporte les modèles au format compatible avec le moteur du jeu. Il reste en accès anticipé et continue d’évoluer avec des corrections de bugs et des fonctionnalités supplémentaires.
La structure des personnages suit une nomenclature précise. Chaque os (bone) doit être nommé correctement pour fonctionner avec le système d’animation. Les proportions s’éloignent du réalisme : corps petits, trapus et cartoonesques. Cette approche renforce le style jouet qui caractérise tous les éléments, des personnages aux meubles.
Un aspect contre-intuitif concerne la densité des textures. Les personnages et accessoires utilisent 64 pixels par unité, tandis que les blocs et props se limitent à 32 pixels par unité. Cette différence répond à plusieurs besoins : permettre plus d’expressivité faciale, améliorer la lisibilité en séparant visuellement les personnages de l’environnement, et offrir davantage d’options de personnalisation pour les cosmétiques.
Les textures doivent être des multiples de 32 pixels (32, 64, 96, 128…) mais peuvent être non-carrées. L’étirement de la géométrie est autorisé dans une fourchette de 0,7x à 1,3x sur un axe pour effectuer de légers ajustements sans dénaturer visiblement les pixels. Au-delà, la déformation devient trop évidente.
Techniques de texturage et choix de couleurs

Le texturage d’Hytale ne nécessite pas de pinceaux complexes. Deux outils suffisent dans la plupart des cas : le crayon avec opacité fixe pour les détails et le pinceau rond doux avec pression d’opacité pour lisser les surfaces et créer du volume. N’importe quel logiciel de peinture convient : Photoshop, Gimp, Krita, Procreate ou même l’éditeur intégré de Blockbench.

Chaque texture est traitée comme une illustration. Les artistes peignent directement les ombres, l’occlusion ambiante et les reflets pour simuler un éclairage plus complexe que celui réellement calculé par le moteur. Cette technique crée une illusion de détail sans augmenter la charge graphique. L’équipe évite le bruit excessif, les grains trop prononcés et les surfaces parfaitement plates qui manqueraient de caractère.
Pour la palette de couleurs, deux règles principales s’appliquent. Le blanc pur et le noir pur sont proscrits car ils cassent l’éclairage dynamique et créent des contrastes excessifs. Les ombres contiennent toujours une touche de couleur plutôt que d’être simplement désaturées. Par exemple, une nuance de violet dans les zones sombres apporte de la vibrance au rendu final.

Le système de matériaux (shading modes) reste limité volontairement pour des raisons de performance et de cohérence stylistique. Blockbench ne peut pas encore afficher ces modes, mais le plugin permet de les définir et de les exporter pour chaque nœud du modèle. Pour prévisualiser correctement un personnage, il est recommandé de désactiver les ombres latérales qui créent des arêtes dures inappropriées sur les volumes organiques.

Installation et premiers pas avec le plugin
Le plugin Hytale pour Blockbench se télécharge depuis le site officiel du jeu. Après avoir installé la dernière version de Blockbench, l’extension s’ajoute via le gestionnaire de plugins intégré. Le code source reste accessible sur GitHub pour les développeurs souhaitant contribuer ou comprendre son fonctionnement.
Une fois activé, le plugin impose automatiquement les contraintes géométriques d’Hytale. Il empêche la création de formes incompatibles et vérifie la densité de pixels lors de l’UV mapping. Les exports génèrent des fichiers directement exploitables par le moteur, incluant les hiérarchies d’os pour l’animation.
Les modèles d’exemple fournis avec le guide permettent de comprendre concrètement l’application des principes. Ils montrent des cas concrets de résolution, d’optimisation de polygones et d’application des shading modes. L’équipe recommande d’expérimenter avec ces ressources avant de créer ses propres modèles.
Compatibilité et évolutions futures
Le plugin fonctionne avec les versions récentes de Blockbench sur Windows, macOS et Linux. Les modèles créés respectent les standards internes d’Hytale mais restent modifiables tant que le jeu n’est pas sorti. L’équipe prévient que le format d’export pourrait évoluer pendant la phase d’accès anticipé.
Les créateurs doivent anticiper des limitations temporaires. Certaines fonctionnalités de personnalisation des avatars se déverrouilleront progressivement après le lancement. Le moteur de rendu continuera d’évoluer avec l’ajout de nouvelles capacités graphiques. Ces changements influenceront potentiellement la manière d’optimiser les modèles.
L’équipe annonce une série de tutoriels supplémentaires sur des techniques avancées : animation, effets visuels, conception d’interface. Ces ressources complèteront ce premier guide pour former une documentation complète destinée aux moddeurs et créateurs de contenu.
Perspectives pour la communauté créative
Ce partage d’outils et de méthodologie intervient bien avant la sortie du jeu. Hytale mise clairement sur une communauté de créateurs active dès le lancement. Les développeurs affichent leur volonté de rendre la création accessible, sans exiger de diplôme en 3D ou de maîtrise du weight painting et du rigging.
La philosophie reste cohérente avec l’ADN voxel du projet : simplicité des primitives, facilité de compréhension, possibilité d’itération rapide. Les contraintes techniques deviennent des garde-fous qui maintiennent une cohérence visuelle tout en laissant place à l’expression personnelle.
Les exemples de modèles téléchargeables (golem de magma notamment) illustrent le niveau de qualité atteignable avec ces outils. Ils servent de référence pour calibrer ses propres créations et comprendre l’équilibre entre optimisation et rendu visuel. La vidéo de Thomas Frick modélisant ce golem en direct décompose le processus de la conception initiale au modèle final.



